Swissness

L’histoire horlogère se confond avec celle d’un pays issu d’une Confédération d’Etats, la Suisse. Elle est faite d’une conjonction de facteurs dans lesquels se mélangent accueils migratoires successifs, ferveurs et religion, configurations géographiques, conditions climatiques, artisanats préservés, et transmissions des savoirs. Sur fond de farouche indépendance, d’esprit de résistance, de sens communautaire et de solidarités corporatistes. En ce sens, l’horlogerie suisse est une culture à part entière.

Lorsque les collectionneurs et les grandes enseignes actuelles évoquent avec passion l’histoire des «paysans horlogers», ils se réfèrent à la réalité d’un climat de montagne où l’hiver, d’une durée de deux à trois mois de plus qu’en plaine, laissait aux paysans du temps libre supplémentaire certes, mais surtout la nécessité de devoir ‘arrondir’ des fins de mois plus difficiles. C’est ainsi que dans leurs fermes, durant ces longs mois, ils bricolaient à la lueur de leurs flammes patientes, des trésors micromécaniques dont l’ingéniosité et la précision suscitent encore la plus fervente des admirations. Ils allaient jusqu’à décorer des parties de calibres horlogers non visibles à l’œil, générant la devise du «faire mieux que nécessaire».

D’autres facteurs ont enraciné à tout jamais en territoires suisses les racines de l’horlogerie. Ils appartiennent aux registres de la géopolitique, des crises du monde, des réfugiés accueillis et de bien d’autres d’éléments. Il est bon parfois de s’en souvenir, tel le fait que, comparativement aux pays environnants, la Suisse était en mesure de fournir une main d’œuvre à moindre coût. Serait-on choqué d’entendre que la Suisse était sur ce point à l’époque comparable à l’Asie d’aujourd’hui? Qu’on pouvait y fabriquer des garde-temps de qualité à moindre coûts surtout lorsque les volumes le réclamaient et que, parallèlement, les logiques industrielles étaient en plein essor?

Parmi les principales régions qui enfantèrent les plus grands noms de l’horlogerie contemporaine, même lorsque parfois ceux-ci partirent ailleurs chercher meilleure fortune (Abraham Louis Breguet, Louis Moinet, Ferdinand Berthoud, Pierre Jaquet-Droz, etc…), il y a bien sûr Genève, la Vallée de Joux ainsi que l’axe du Jura auquel les montagnes neuchâteloises sont rattachées. Ainsi, de Fleurier jusqu’à Bienne, en passant le Locle, La Chaux-de-Fonds et l’actuel Jura libre ou le Jura bernois, l’horlogerie est née, s’est peu à peu développée et connaît l’un essor considérable qu’on lui connaît aujourd’hui.

Dans le Val de Travers, qui s’écoule dans le Canton de Neuchâtel en direction de la France, le chef-lieu Fleurier résonne toujours de prestige et de renom. Notamment parce qu’en ces lieux trouva refuge un certain Jean-Jacques Rousseau. Aux alentours, il y a petit village de la Côte-aux-Fées, berceau des Piaget, des Grandjean, et de tant d’autres familles liées à l’horlogerie. Parallèle à ce val, la Vallée de La Sagne profite également de ces activités. Pensons à la célèbre Martel Watch, implantée aux Ponts-de-Martel, pensons aussi à David-Henri Grandjean, natif de l’Entre-deux-Monts, un lieudit des environs du Locle.